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Nouvelle tentative d’instaurer le brevet logiciel via le protocole de Londres et l’EPLA

jeudi 6 juillet 2006, par Philippe de Tilbourg

Nancy, le 6 juillet 2006 — Il y a un an jour pour jour, le Parlement européen faisait obstacle à la légalisation des brevets logiciels en Europe en rejetant à la quasi-unanimité la proposition de directive soutenue par la Commission européenne et le Conseil de l’UE. Malgré ce vote sans appel, les lobbies favorables à l’instauration d’un brevet logiciel n’ont pas baissé les bras et leurs manoeuvres visent à présent à contourner le vote du 6 juillet 2005.

Il se dessine actuellement deux projets très semblables, dont l’aboutissement accorderait à la jurisprudence de l’Office européen des brevets (OEB), y compris ses pratiques illégales ayant conduit à l’octroi de dizaines de milliers de brevets logiciels, le rang de jurisprudence officielle de l’UE. Ceci alors que la Convention sur le brevet européen (CBE) qui n’a pas été dénoncée, exclut explicitement les programmes d’ordinateurs du champ de la brevetabilité. Les brevets logiciels accordés par l’OEB contre l’esprit et la lettre de la CBE deviendraient pourtant dès lors applicables en droit européen.

Le premier projet, le brevet communautaire, proposé par la Commission européenne, est en discussion depuis des années et semble s’enliser.

Le second projet en revanche, paraît recueillir l’aval des lobbies du brevet logiciel qui ont d’ores et déjà commencé à en faire la promotion au Parlement européen et dans les États membres. Ce projet est initié au sein même de l’OEB et se compose de deux parties : le protocole de Londres et l’accord sur les litiges en matière de brevet européen (en anglais : European Patent Litigation Agreement/EPLA).

Le protocole de Londres attend toujours d’être ratifié par la France. Dernièrement, les députés UMP Daniel Garrigue et Pierre Lequiller ont déposé, suite à la demande du Premier Ministre, un rapport de la Délégation de l’Assemblée nationale pour l’Union européenne qui « recommande la ratification par la France du protocole de Londres ».

Ce rapport affiche tout du long une position extrêmement biaisée qui ne fait que refléter l’argumentaire des principaux partisans d’une brevetabilité illimitée. La FFII France regrette de ne pas avoir été invitée aux auditions et s’étonne de constater que le rapport ne fait droit qu’aux partisans d’une brevetabilité tous azimuts.

Le principal argument avancé par les partisans de ces accords, Office européen des brevets en tête, vise à faire accepter l’idée que des brevets moins chers favoriseraient l’innovation et la compétitivité en Europe.

Les travaux menés par la FFII depuis 1998 sur les liens entre brevets, innovation & compétitivité en matière d’ingénierie logicielle mettent en lumière qu’il s’agit là d’un contresens complet. D’une part, les brevets ne sont qu’un instrument parmi d’autres pour favoriser l’innovation. Et d’autre part, cet instrument s’avère en fait représenter un frein à l’innovation dans certains domaines d’activité, celui du logiciel étant le plus emblématique : un recours systématique aux brevets au détriment du droit d’auteur ne conduit pas à plus d’innovation et de compétitivité mais au contraire à « geler » les positions acquises par quelques grands acteurs qui représentent à peine 20% de l’activité du domaine, à empêcher les nouveaux entrants sur ce marché et à conduire les autres à épuiser leurs ressources dans d’incessantes querelles juridiques.

Le résultat immédiat d’une telle décision verrait un déferlement de revendications juridiques s’abattre sur les entreprises logicielles européennes émanant des entreprises étrangères (américaines, japonaises, chinoises) qui ont déposés de tels brevets par milliers auprès de l’OEB. Revendications auxquelles le secteur, composé, en Europe comme en France, à plus de 80% de PME, serait bien incapable de faire face. C’est donc véritablement un suicide collectif de l’industrie européenne du logiciel qu’on propose aux différents gouvernements nationaux d’entériner.

À l’heure où le gouvernement français inscrit le patriotisme économique au rang de ses priorités il serait inconcevable que ces deux textes, qui condamnent à une mort quasi-instantannée l’écrasante majorité des PME françaises du secteur logiciel, puisse être ratifiés.

La FFII France a envoyé une lettre-argumentaire aux membres de la représentation nationale et en appelle aux chefs de l’État et de l’exécutif afin qu’ils dénoncent clairement ces deux accords qui ne peuvent aboutir qu’à remettre en cause la place de l’Europe et de la France dans la société informationnelle.

Voir la lettre complète : http://www.ffii.fr/article249.html

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